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[CINEMA] "Murder Party", comédie cartoon (mais pas que) #1: NICOLAS PLESKOF, réalisateur

Dernière mise à jour : 22 mars 2022

"Murder Party" est une comédie policière haute en couleurs, au propre comme au figuré, conçue comme un jeu grandeur nature avec de vrais comédiens dans un château intemporel... Nicolas Pleskof, son réalisateur, a su emmener avec lui Kazak Productions ("Titane", la dernière Palme d'or à Cannes, c'est eux!), Elsa Marpeau (scénariste et romancière dont la réputation n'est plus à faire), Miou-Miou, Eddy Mitchell, Zabou Breitman, Alice Pol, Pablo Pauly, Sarah Stern, Gustave Kervern, Pascale Arbillot, excusez du peu!, et une équipe technique en or...


Bref, une dream-team, qui ne tarit pas d'éloges sur la manière dont Nicolas a su diriger les comédiens et maîtriser le plateau... Cela méritait bien un long entretien comme on les adore sur ce blog! Mais, ce n'est pas tout. Parce qu'encourager les projets et nourrir les vocations est au coeur du travail de Culture Etc, vous aurez le droit à toute une série de témoignages pour plonger dans la fabrication du film avec celles et ceux qui l'ont fait... Vous êtes prêts? ACTION!


PS: en fin d'article, vous trouverez toutes les dates des avant-premières en présence de l'équipe


EN SALLES LE 9 MARS



"MURDER PARTY", la grande aventure d'un 1er film

une série exceptionnelle d'ITWs exclusifs


Dimanche 6 février:


Dimanche 13 février:


Dimanche 20 février:

ou parole au Chef Opérateur Son


Dimanche 27 février:

ou parole à l'équipe


Nicolas Pleskof et Alice Pol sur le tournage de "Murder Party" (C) Kazak Productions

Bonjour Nicolas ! On va commencer par le début... Quelle envie est entrée en 1er dans ta vie: raconter des histoires, faire des films, écrire des scénarios...


Bonjour Philippe... La 1ère envie, c'était des images. Quand j'étais petit, je dessinais beaucoup, puis, vers 12-13 ans, j’ai commencé à injecter des petits récits dans mes images en faisant des BD. L'envie d'écrire des scénarios est arrivée à peu près à ce moment-là. A 12 ans, j'ai gagné un concours de scénarios pour une émission de marionnettes sur France TV qui s'appelait les Minikeums. Le film a été tourné, diffusé sur France 3... Ca a assis un truc en moi d'une évidence totale. Après, j'ai fait des courts-métrages auto-produits pendant des années.

Des courts-métrages de fiction en images réelles ? Pas des films d'animation ?

Non. J'ai un peu essayé de faire des choses image par image, tu crois que c'est simple mais c'est d'une complexité folle. C'était des Courts-Métrages de fiction, mais j'ai toujours gardé un lien avec l'animation : quand j'ai commencé à travailler professionnellement, j'ai co-écrit beaucoup de films d'anim', avec Kazak Productions notamment, j'ai aussi fait de la série d'animation pour les enfants... La question de l'anim', du cartoon, a toujours été au cœur de moi et « Murder Party » est d’ailleurs presque un cartoon dans son esthétique.

L'idée de faire parler des images, c'est un jeu ?

Bien sûr. Complètement. C'est très enfantin, en tous cas dans ma démarche. Mon film est tout à fait cohérent avec ce parcours-là dans le sens où c'est un film qui parle de jeu, d'enfants et d'enfance.

En regardant l'esthétique de ce qu'on voit, on pense à « 8 femmes » de Ozon, on pense aussi à Tim Burton.

« 8 femmes » est bien sûr une grande référence pour moi. D’une manière générale, les cinéastes qui me fascinent, qui m'attirent, sont des cinéastes de l'excès, de la saturation. Souvent des cinéastes de l'imaginaire et de l'enfance là encore. Ozon n'est pas un cinéaste de l'enfance à proprement parler, mais c'est un cinéaste du glamour et du pop, qui pour moi est une forme d'évolution de l'esthétique de l'enfance. Tim Burton, évidemment, Wes Anderson, aussi. Jeunet. Des gens qui font des fictions avec comme canevas « on dirait que... ».

On va basculer directement dans « Murder Party », on y est en fait déjà complètement : ça a été la consigne que tu donnais à tes comédiens et à toute ton équipe...

J'ai demandé aux comédiens d'être dans une démarche très 1er degré. Je leur disais : ne jouez pas (la comédie) mais jouez (comme des enfants). Faites comme si vous aviez tous 10 ans et il se trouvait que papa était mort et il se trouvait que machin était accusé, c'est ce qui m'a permis aussi de trouver le ton du film. D'ailleurs, les enfants aiment beaucoup le film, alors qu'il s'y passe des trucs a priori sombres. Mais ça ne m’étonne pas, quand un enfant joue, même s'il joue les situations les plus horribles, ça n'est jamais vécu comme quelque chose de grave ou d’effrayant. Il y a une distance avec la réalité qui l’empêche de vivre les choses de façon trop dramatique, et c'est vrai que c'est ce que je voulais que tout le monde fasse. Pour la direction artistique et l'équipe technique, c'était la même chose, c'était vraiment « Allez le plus loin possible, soyez dans l’excès, soyez vraiment comme un enfant qui joue », mais pour autant, le film restant un polar, cette folie devait aussi être inquiétante et piégeuse, il fallait que l’esthétique cartoon frôle le psychopathe et le fétichisme, qu’on se dise : c’est un monde enfantin, certes mais déglingué, pas net, trop net. Le travail de mise en scène sur ce film, c’était une oscillation permanente entre le lâcher-prise et l’hyper-maitrise.


"Murder Party" Pablo Pauly et Alice Pol (C) Kazak Productions

Pour arriver à mettre en place tous les éléments du puzzle pour que les comédiens sur le plateau aient cette souplesse, ce plaisir... Il y a eu tout un travail au départ à commencer par le scénario.

Oui, un travail très précis et long. C'est 5 ans d'écriture.

5 ans !!

Oui, 5 ans. La première ligne de l'histoire, c'est novembre 2014. Le premier synopsis de ce qui deviendra le film date de mi 2015, Mais c'est un normal pour un 1er film, en tout cas pas inhabituel. Le cinéma français, dans son système de financement, est en immense majorité fondé sur l'écrit (d’autant plus quand, avant, vous n’avez fait que des courts-métrages). Le scénario est un document avec lequel vous prétendez demander des millions d'euros... Tout repose sur ces 90 pages-là, ce qui est assez vertigineux. J'avais une idée très précise de ce que je voulais, mais je savais aussi que le polar, et notamment le polar « à la Agatha Christie », genre « Cluedo » qui était ce que je voulais faire, est quelque chose de très technique. Du coup, je ne voulais pas et ne pouvais pas l'écrire seul. Je suis donc allé demander à Elsa Marpeau, une très grande scénariste, de collaborer avec moi. C'est elle qui a créé la série « Capitaine Marleau », elle publie aussi des polars à la Série Noire chez Gallimard : elle excelle autant dans la série d'enquête populaire que le polar le plus trash, je me suis donc dit qu'il y avait en elle une absence de chapelles qui serait idéale pour le film. On a fabriqué le scénario ensemble. Et c'est vrai que ça a été un travail de longue haleine, de ping-pong, pour arriver à l'histoire la plus proche de moi possible tout en étant aussi la plus universelle et la plus généreuse. Le film est évidemment à la première personne, mais je ne voulais pas d’une histoire égoïste qui ne s'adresserait qu'à une toute petite part des spectateurs ou à une cinéphilie très aristocratique, je voulais quelque chose qui soit très généreux et touche les gens, ce qui peut être particulièrement ardu dans le cinéma de genre.

Vous avez réussi tous les deux pareils à vous amuser ?

Oui, car Elsa et moi nous entendons divinement bien, mais c'est vrai que le scénario, c'est l’étape de travail la plus laborieuse dans le sens premier du terme. La part de plaisir et d'amusement est là tout au début, quand les idées germent, et tout à la fin quand la structure et les personnages sont solides. Entre temps, c’est du point de croix. Par contre, quand on arrive à ce moment de fluidité où l’on connait ses personnages par cœur à tel point que l’on finit par savoir automatiquement comment ils réagiraient dans telle ou telle situation, là, on tente des choses... et là enfin on s'amuse, vraiment.

Si tout est bien préparé, ça marche tout seul ?

Ca marche tout seul... je n'irais pas jusque-là ! Mais, en tout cas, il y a quelque chose de l'ordre de l'évidence qui arrive vraiment dans les toutes dernières étapes. Pour que ça marche tout seul, il faut avoir fabriqué quelque chose d'hyper solide. C'est vraiment une course de fond, le scénario. C'est très, très difficile. J’ai trouvé ça, pour ma part, beaucoup plus difficile que de mettre en scène.

Ca dure 5 ans et un tournage dure 6 - 7 semaines ?

C'est ça...

Tout l'univers esthétique, avant d'arriver au tournage lui-même, ça a été pareil ? Un long travail de préparation ?

"Murder Party" Alice Pol et Pablo Pauly (C) Kazak Productions

Oui et non. Un des avantages d'écrire pendant 5 ans, c'est qu'à la fin, votre film, vous le connaissez par cœur : vous savez exactement ce que vous voulez. Et l’esthétique du film n’a, dans ma tête, jamais bougé depuis le départ. C'était : donner l'impression qu'on arrive sur un plateau de jeu. Je voulais dé-réaliser l'univers. Je voulais que tout soit le moins naturaliste et le plus ludique possible. Qu'on soit dans une esthétique cartoon, glamour, très inspirée du Technicolor, des films des années 50, une esthétique qui assume son artificialité. Quand on regarde les Hitchcock en couleurs, et plus globalement les films de studio des années 50, ils sont sublimes d'être trop éclairés, il y a 3 ombres derrière les personnages, on utilise beaucoup de courtes focales qui font des décors très profonds, il y a quelque chose de sublimement artificiel. C'est ce que je recherchais pour ce film-là, pour nous extraire de la réalité. J'adore Wes Anderson justement parce qu'il y a tout un travail de dé-réalisation permanent de par l'utilisation des couleurs et de la géométrie, j'aime aussi infiniment le flamboyant d’Almodovar, ou, dans un registre qui n’a rien à voir, Argento qui pousse l’expressionnisme coloré à son maximum.


J'avais envie de faire entrer dans un jeu, dans un monde où on se dit : tout est possible. En fait, pour moi, à vrai dire, il n'y avait pas d'autre esthétique possible. Quand on prend ce qui se passe dans le scénario, c'est, en soi, extra-ordinaire au sens étymologique : c'est aberrant, ça ne pourrait pas arriver dans la réalité ! Une famille entière qui fait des jeux géants dans un manoir d’où on ne peut pas sortir mais où tout est possible, je veux dire, cette histoire-là, si je la filme de façon hyper naturaliste sans lumière artificielle, avec des costumes gris, des acteurs qui jouent de façon réaliste dans un décor filmé à l'épaule, on va se dire non, je n'y crois pas ! Par contre, si je la filme dans un décor qui ressemble à une maison de poupée géante, éclairée comme un cartoon, avec des costumes pop, des acteurs qui jouent de façon très excessive… quand on arrive dans ce monde-là, on se dit OK, je suis dans un monde de fous, qui permet toutes les folies, donc je suis prêt à accepter que ça aille très loin puisque le monde lui-même est ajusté à ça. Paradoxalement pour qu'on croit à cette histoire, il fallait que tout soit incroyable à la hauteur de la folie du scénario. C'est pour ça aussi que j'ai fait un monde qui n'est d'aucune époque. La direction pour l’équipe, c’était « contemporain suranné ». Il y a des portables, mais on a aussi des éléments qui font penser aux années 60-50. Idem pour le manoir, qui est un maelstrom de styles et d’époques. En invalidant le temps et l'espace, je permettais qu'on accepte une histoire folle ! J’ai travaillé avec une équipe artistique fabuleuse, Gilles Porte à l’image, Jérémie Duchier au décor, Dorothée Guiraud aux costumes, pour ne citer qu’eux.

"Murder Party" Alice Pol (C) Kazak Productions

Tu nous emmènes dans une fête foraine en fait ?

Oui ! C'était vraiment l'idée ! Un train fantôme, ou une de ces « maisons du rire » des foires, ces trucs où au bout de chaque couloir, on va trouver un piège... Là, le manoir est construit comme ça : derrière chaque porte, il y a une salle qui ressemble à un jeu de société.

Comment as-tu emmené tous les comédiens avec toi ?

Il y a le scénario bien sûr, mais la première rencontre est l’étape où tout se joue vraiment. Ce qui était important, c'était que quand je les rencontre la première fois, ils se rendent compte que je savais exactement où je voulais aller. Que j'étais extrêmement clair. Le film est un pari. Quand on lit un truc comme ça, une comédie qui joue avec le grotesque, de quelqu'un qui n'a jamais fait de long-métrage avant, je pense qu’on se dit que c'est très risqué. Ce genre de projet, si c'est foiré, c'est super foiré. La comédie ne pardonne pas une seule seconde. C'est le « genre double peine », le moins reconnu culturellement et en même temps, le plus dur à faire et le plus précis. On ne pardonne pas les faiblesses d’une comédie comme on pardonne celles de films plus naturalistes, on ne trouvera jamais ça charmant une comédie ratée. Du coup, je savais que c'était ça qu'il fallait que je montre : que je savais ce que je voulais et où je voulais aller. Quand je les ai rencontrés, je crois que ce qui a pu les conforter dans leur choix (mais il faudrait leur demander) c'est que j'avais une idée de film très précise. Je leur ai donné un canevas au sein duquel je voulais définir leur travail, à savoir une sorte de sophistication à l’anglaise, d'exagération théâtrale mais pas théâtreuse, de l'excès, mais sans jamais basculer dans le théâtre de boulevard...

Je leur ai dit de regarder les comédies de François Ozon et les films de Blake Edwards... Après, je leur ai montré des images, je leur ai parlé de films références très précis, notamment « Cluedo, le film » une série B géniale de Jonathan Lynn adaptée du jeu ; « Murder by death » (« Un cadavre au dessert ») un truc fabuleux avec Maggie Smith, Truman Capote, Peter Falk, Peter Sellers, sorti dans les 70's. D'une manière générale, je leur ai dit de s'abreuver de tous les « Whodunit », c'est un genre qui n'a cessé d'exister au cinéma, notamment français, depuis 100 ans. Ça va des films de Pascal Thomas, de Bruno Podalydes aux « Petits meurtres d'Agatha Christie » qu'il y a toutes les semaines à la télé. C'est un genre très balisé...


Ceci posé, mon film, dans son 3ème tiers, bascule complètement et assez radicalement, mais je ne peux pas en dire plus ! Ce qui m'intéresse justement dans ce type de films là, c'est qu'on part toujours du même canevas, et que l'identité du réalisateur apparaît dans sa manière de subvertir tout ça, d'en faire quelque chose de très personnel ou méta. Si j’ai bien travaillé, vous ne devriez absolument pas être capable de deviner la fin du film.

On va conclure... Je trouve que ce film tombe très bien en ce moment, parce qu'on a besoin de ça. On a besoin de s'évader, on a besoin de partir complètement ailleurs et de jouer...

"Murder Party" Eddy Mitchell (C) Kazak Productions

Tu m'en vois ravi ! Mon souhait, c'était exactement ça, de faire le film le plus ludique possible. Que les gens en ressortent amusés, qu'ils aient réfléchi, qu'ils aient été surpris, qu'ils aient ri… Enfin, vraiment, qu'ils se soient évadés comme quand on fait une partie de jeu un dimanche après-m' où tout à coup, pendant deux heures, on abandonne nos codes pour entrer dans les codes d'un autre monde, avec d'autres règles et d'autres manières d'avoir des rapports les uns avec les autres. Donc, oui, je voudrais que ce soit une échappée de la réalité. D’ailleurs, dans sa fabrication, le film l'a été pour moi. C'est un film qu'on a fait sous COVID de A à Z : on a tourné il y a un peu plus d'un an pendant le 2ème confinement. C'était très étrange, parce qu'on avait le droit de tourner, mais tout était fermé. On avait des attestations pour tout faire, on ne pouvait pas vraiment se voir hors tournage. C'était une échappée belle totale : pendant la journée, j’étais heureux de pouvoir travailler avec les comédiens et mon équipe, on fabriquait un film de et dans le plaisir, et le soir quand on rentrait, qu'on allumait la télé, c'était l'apocalypse. J’ai eu beaucoup de chance de pouvoir le faire, c’est un peu un miracle qu’il soit passé entre toutes les gouttes et existe. J'aimerais bien que le film soit, à son échelle, 2h d’échappée belle pour les spectateurs. Je voulais faire une comédie populaire, au sens le plus noble du terme, qui ne prend pas les gens pour des imbéciles, n'est pas un produit, mais qui en amusant et en inspirant, amène aussi une forme de réflexion. J'espère que ça sera le cas.


Propos recueillis par #PG9 - Un grand merci à Mensch Agency pour m'avoir fourni les éléments qui m'ont permis de préparer les interviews


"MURDER PARTY" de Nicolas Pleskof

en salles Mercredi 9 mars!


"Murder Party" Alice Pol, Miou-Miou, Pablo Pauly, Pascale Arbillot, Adrien Guionnet, Sarah Stern, Gustave Kervern (C) Kazak Productions

AVANT-PREMIERES

*8 Février: LYON, UGC Confluence (20h15) + Pathé Bellecour (20h)

*9 Février : ANNONAY, Festival du Premier Film (18h30)

*14 Février: LE GRAND BORNAND, Cinéma les Rhodos (20h30)

*15 Février: 2 séances CHAMONIX, Cinéma Le Vox (18h) BONNEVILLE, Cinéma le Château (20h)

*17 Février: TOULOUSE, Gaumont Wilson (20h)

*24 Février: DIJON, Ciné Cap Vert (20h30)

*28 Février: BORDEAUX, UGC Ciné Cité (20h) *3 Mars: PARIS, UGC Ciné Cité Les Halles (20h15)

*6 Mars: NANTES, Pathé Atlantis (15h30)




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