Une découverte et un entretien pour comprendre...
Dans une ambiance rap et ghetto, mélangeant la langue classique de Molière avec la langue de la jeunesse d’aujourd’hui, une version généreuse et déjantée du chef-d’oeuvre de Molière, dessinée dans le respect du texte et portée par de tout jeunes acteurs, dans une modernité qui donne tout son sens à la pièce.
Un jeune voyou habitué à vivre avec sa solitude mettra sa liberté et son intégrité physique en jeu pour l'amour de l’humanité. Rendre service à une jeunesse appartenant à une classe sociale au-dessus de la sienne dans l’espoir d’y accéder. Sera-t-il remercié ou abandonné ?
Cette adaptation, à la fois innocente et insolente, a pour ambition d’être plus représentative et plus proche de la jeunesse d’aujourd’hui. Si le texte original a été conservé, des liens nouveaux entre certains personnages ont été tissés : amours assumées ou inavouées, liens de parenté, trahisons et passés douloureux viennent renforcer l’intrigue initiale de Molière.
Des créations musicales et instrumentales originales, agrémentées de transitions improvisées où le langage est totalement contemporain, quelques notes urbaines avec un peu de rap et un squat en guise de décor inscrivent définitivement ce Scapin dans la France d’aujourd’hui.
Mais c’est principalement dans le jeu des acteurs, dans l’humour, dans les directions données aux répliques et finalement bien dans l’écriture même que la compagnie a exploré la modernité de Molière.
Pour en parler, nous avons pris contact avec Pierre Boiteux, le Producteur, pour qu’il nous explique comment il a craqué sur cette aventure...
Enchanté Pierre. Comment vous sentez-vous pour ce soir?
Enchanté Philippe. Je suis toujours stressé un jour de première...
Quelle est la particularité de ce projet ?
La particularité, c'est que c'est une bande de jeunes comédiens qui a monté ça il y a 5 ans autour d'un metteur en scène, Tigran Mekhitarian, un mec formidable qui a grandi dans les banlieues, c'est un immigré arménien, qui en lisant Scapin pendant ses cours de théâtre au Cours Florent s'est rendu compte qu'il y avait de grandes similarités. Dans les banlieues, certains voyous arrivent à avoir du monde autour d'eux parce qu'il ont du bagout. C'est grâce à la parole qu'ils s'en sortent et Scapin, c'est exactement ce qu'il fait . A partir de là il a fait tout un parallèle. C'est pour ça que nos Fourberies de Scapin se passent dans un squat et c'est pour ça qu'on parle d'une adaptation urbaine...
Et ce projet vous l'avez rencontré comment ?
C'est une amie avec qui je co-produisais déjà des spectacles qui est tombée sur eux au Festival d'Avignon en 2016 dans mon souvenir. En revenant, elle m'a dit “je crois que tu devrais aller voir ce spectacle”. A ce moment-là, je ne cherchais pas forcément à produire mais je suis toujours intéressé et elle a insisté. J'ai rencontré Tigran, le metteur en scène un petit peu avant d'aller les voir. Déjà, Tigran est quelqu'un de formidable, passionné par la langue française, par Molière par le théâtre. Il a commencé à me parler du spectacle... je suis allé les voir et en effet je suis tombé juste raide-dingue du spectacle, donc après on est partis à Avignon, avant ils ont joué au Mesnilmontant quelques mois, ensuite on est allés jouer à l'Epée de Bois également. Et de fil en aiguille on est arrivés au Théâtre 13.
...pour une longue programmation ?
Oui on joue du 12 mars au 14 avril, 6 jours par semaine, donc ça va être intense du mardi au samedi à 20h et le dimanche à 16h. C'est au Théâtre 13 - côté scène, celui qui est rue du Chevaleret...
C'est une belle aventure !
Oui. C'est une très belle aventure, on est plutôt contents... Après, il faut que les gens viennent maintenant
Est-ce que entre ce que vous avez découvert et ce qu'on va voir sur scène là au Théâtre 13, des choses ont-elles bougé ? Avez-vous fait bouger de choses ?
Moi, en tant que producteur, jamais. C'est ma ligne directrice: je n'interviens jamais sur l'artistique. On discute, parfois il y a des avis, on a des débats, mais celui qui a le maître mot final, c'est le metteur en scène. Il a la création artistique en mains, si je ne suis pas d'accord, je ne produis pas, c'est tout. Je suis pas metteur en scène. Par contre, oui, le spectacle a évolué. Déjà parce que eux ont évolué, c'est vraiment une famille, ils sont 10 comédiens sur scène, ils ont monté le projet ensemble, donc forcément, depuis 5 ans, ils ont grandi, ils ont mûri, le spectacle aussi. Des choses ont été rajoutée d'autres modifiées... et, à chaque fois, Tigran veut qu'il y ait un ancrage dans la réalité. Donc, il trouve un angle d'attaque pour montrer que le texte de Molière est hyper moderne parce qu'il y a toujours des choses lui répondent. Pendant un moment ça a été la période me-too, il y a encore parfois des références là-dessus, d’autres fois, ce sont les bavures policières, enfin voilà, il y a plein de choses dans Molière que l'on retrouve dans l'actualité quotidienne Tigran aime bien reprendre ça dans sa mise en scène.
On peut savoir déjà l'angle d'accroche qui va être choisi pour réactualiser le projet sur la session Théâtre 13 ?
Je crois que le choix se fait dans 1h ou 2h (NDLR: l’ITW a été réalisé à 12h le 12/03). Ca n'a toujours pas été fait. Il y en a plusieurs en discussion. L’actualité est assez intense ces derniers temps. Et notamment une des thématiques chez Molière, c'est les puissants contre les non-puissants... Les puissants qui ont toujours la loi de leur côté et il y a quand eu pas mal de choses qui se sont produites dernièrement qui sont intéressantes... On en parle tout à l'heure pour savoir laquelle il choisit.
Ca sera donc surprise ce soir !
Exactement
Pourquoi ce projet est-il particulièrement important pour vous ? Est-ce qu'on peut revenir là-dessus ?
Pour moi, le projet est super important pour plusieurs raisons. La 1ère, c'est que quand on travaille dans le monde du spectacle, on ne peut être que hyper fier de produire ce genre de choses. Des amis qui ne sont pas forcément des grands fans de théâtre que j'ai réussi à faire venir voir le spectacle, ont adoré la pièce. C'est une pièce qui plaît à des gamins de 7-8 ans autant qu'à des personnes de 30 à 80 ans... Il y a vraiment une force dedans, une réappropriation de Molière époustouflante. Tigran a mis du rap sur Molière et à faire en sorte que les fans de théâtre classique apprécient le spectacle quand même. Il y a un tour de force là-dedans qui est artistiquement hyper intéressant à produire. Et puis, cette équipe, je la côtoie depuis maintenant depuis 3 ans, je les adore, parfois j'ai l'impression d'être plus que le producteur, j'ai l'impression d'être le papa, le grand frère, le petit frère ce que vous voulez, c'est une aventure humaine assez émouvante. Et puis, après, pour les gens qui sont habitués au théâtre, produire une équipe de 10 personnes pendant un mois, quand on est producteur, on sait ce que ça veut dire financièrement, donc c'est également un gros pari. C'est tout ça qui fait que c'est une chouette aventure. En plus, on arrive dans un théâtre mythique où énormément de monde rêve de jouer... Donc rien que le fait d'y arriver, c'est déjà une preuve de la qualité du spectacle. C'est le théâtre qui a notamment fait émerger Michalik, par exemple, quand on arrive là-dedans, on est contents. Et puis après, on espère que ça va fonctionner.
C’est tout ce qu’on vous souhaite! M... pour la 1ère ce soir...
Propos recueillis par #PG9
#Paris [Théâtre] 12/03-14/04 Théâtre 13 Molière/ Tigran Mekhitarian: “Les Fourberies de Scapin” http://www.theatre13.com/saison/spectacle/les-fourberies-de-scapin
Une adaptation de dingue de ce classique par Tigran Mekhitarian et toute sa compagnie de L’Illustre Théâtre : Theo Askolovitch, Louka Meliava, Théo Navarro-Mussy, Damien Sobieraff, Blanche Sottou,Axel Giudicelli, Samuel Yagoubi, Isabelle Andrzejewski, Charlotte Lv, Pauline Huriet, Etienne Paliniewicz, Sébastien Gsk. Prod: En Scène Productions - Le Proscenium...
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