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[Pourquoi Slamez-vous?] Coupe de la Ligue Slam 2019: Ndrix, Lille

Slameuse/ Slameur: Ndrix

Equipe de: Lille




Pourquoi Slamez-vous?

Enquête auprès des slameurs sélectionnés pour la Coupe de la Ligue Slam de France 2019 www.ligueslamdefrance.fr


Bonjour Ndrix ! Première question... Comment as-tu rencontré le slam?


Bonjour Philippe! Alors moi, j'ai un parcours tout à fait atypique parce que j'ai rencontré le slam sur le net. J'allais sur un site qui s'appelait “2nd life” et là, il y avait pas mal de slameurs de partout en France qui se retrouvaient une fois par mois pour faire une scène virtuelle. Le principe a été repris depuis par Nanda la Gabona de Paris. On avait tous un avatar, un personnage virtuel, on communiquait via casque et micro et on faisait de véritables tournois. A l'époque, il y avait au Mans un tremplin, un des plus gros événements slam de l'année et un des animateurs de ce tournoi, Zébiam, organisait justement ces tournois virtuels. Tous les ans, il ouvrait aux poètes du net des places pour ce tournoi bien réel... et j'ai été qualifiée une année. Ma toute première scène dans la vie réelle, je l'ai donc faite au cours d'un des plus grands tournois de France ! Imagine la panique ce jour-là. Quand je suis montée sur la scène, j'étais aveuglée par les spots, et sans la présence bienveillante de Zébiam, je pense que je tournais les talons pour rentrer chez moi. Trop peur ! Ca a été ma première approche du slam. J'ai rencontré au Mans des poètes qui venaient d'un peu partout et je me suis rendue compte qu'à Lille il n'y avait pas ce genre d'événement. Du coup, j'ai eu envie de partager cette belle expérience à mon retour et j'ai organisé avec l’aide de Ciccio, un jeune slameur qui arrivait de Reims, les premières scènes slam de Lille. Depuis, je fais ça...


Tu dis que tu as participé virtuellement au slam au début, donc tu écrivais déjà avant?


Je me suis mise à écrire au fur et à mesure. En fait, quand j'ai rencontré ces personnages que je ne connaissais pas du tout, j'ai commencé par les écouter, puis j'ai trouvé que c'était un sacré moyen d’expression. Dans le slam, on s’exprime librement sur tous les sujets possibles. L'animateur m'a dit : “tu peux slamer n'importe quoi”. J'ai bien sûr commencé en lui disant, je ne suis pas poète moi, je n'écris pas, je ne sais pas faire ! Il m'a dit : “tu peux même slamer ta liste de courses !”. Donc, par défi, et puisque je suis un peu une folle dingue, un jour, je l'ai fait. Et il m'a dit : “tu vois bien que tu es poète!”. Le fait d'écouter les autres ça donne envie et, comme j'étais bien cachée derrière mon écran, c'était bien. J'ai commencé comme ça.


Il n'y a pas la timidité d'être soi même sur scène...


Derrière un écran d’ordinateur, il n'y a pas le regard des gens. C'est un peu comme les auditions à l'aveugle de “The Voice”. J'étais cachée, personne ne me voyait. Du coup, je m’exprimais bien plus librement. Alors que, sur une scène il faut tout assumer son texte évidemment mais aussi son interprétation et sa gestuelle. Au début je n’osais pas bouger. Depuis, j'ai évolué.


Tu as même évolué de deux manières. D'abord, tu es devenue organisatrice d'un RDV Slam à Lille, tu disais...


A Lille, il y avait une tradition de scène ouverte de poésie, mais une réelle aversion pour les tournois car le côté “notation” faisait peur aux poètes. Je voulais leur montrer que c’était juste une autre ambiance, un prétexte à faire participer le public, aussi, et surtout à ne pas poétiser en cercle fermé, entre poètes lillois. Ça s’est fait progressivement. J’ai d’abord observé comment ça se passait ailleurs. Je me déplaçais là où on m'invitait. J’ai découvert une communauté soudée et ouverte aux rencontres. Je suis allée notamment au Panorama Vernou, sur la scène de LordMikeJam et Chadeline, dans le 77. Ce sont de vrais activistes du slam qui font vraiment plein de choses en plus d’animer leur scène. Ils ont des ateliers d’écriture en milieu scolaire, ce sont les rois des textes collectifs, ils ont été champion de France, ils sont allés au Championnat du Monde... Et ce sont des personnes très humaines qui m'ont permis de m'exprimer sur leur scène et m’ont encouragé à lancer la mienne. J'y suis allée plusieurs fois. J’ai assisté aussi à la Coupe de la ligue Slam, au GSN (Grand Slam national)… Tous ces grands événements m’ont montré les différentes façons d’animer un tournoi. J’ai vite compris que chaque animateur avait sa propre énergie. Après, c’est bien d’observer, mais à un moment il faut se lancer et là encore la solidarité a fonctionné puisque ce sont des slameurs de Reims, de l’association Slam Tribu, qui sont venus nous donner un coup de main pour lancer notre première scène. C'est important d'être un peu chapeauté au début parce qu'on ne sait pas trop comment s'y prendre. On avait trouvé un bar qui voulait bien nous accueillir, mais on avait besoin de slameurs pour donner un aperçu de l’ambiance d’un tournoi. Depuis, on a changé plusieurs fois de bar, mais on est toujours là...


Ça fait combien de temps?


Ça doit faire 7-8 ans. Il n'y a pas si longtemps en fait. Moi, ça me paraît depuis tout le temps, mais non! On n'est pas une grosse scène. On a une 15 aine de slameurs réguliers et des gens de passage. On a toujours des surprises de personnes qu'on n'a jamais vues, qu'on voit une fois, qu'on ne voit plus ou qui reviennent, c'est le principe...


C'est une fois par mois?


On a pris le parti de slamer différemment une fois par semaine dans des lieux différents. Le 1er mardi de chaque mois, j'anime une scène ouverte dans un bar. La formule, là, c'est une première partie avec un artiste pour un petit spectacle de 45mn environ, puis ensuite c'est la scène ouverte. Là, il y a de tout : chanson, slam, il peut y avoir du mime, enfin un peu n'importe quoi. La 2ème semaine, on va à Douai. Là c'est aussi une scène ouverte dans un bar, mais exclusivement slam. La 3ème semaine, on reste à Lille et on fait un tournoi, donc avec notes, classement etc... C'est à cet endroit qu'on qualifie les équipes lilloises pour aller sur d'autres tournois. Et la 4ème semaine, on a de nouveau une scène ouverte, plus “musicale”, spoken words à Lille. On invite un musicien et on met nos mots en musique d'une manière tout à fait libre. Ca n'est pas préparé, le musicien nous accompagne ou pas en fonction de l'envie. C'est souvent très sympathique aussi.


Vous faites plein de choses, c'est super !


Oui ! Surtout, on essaie de varier. On a aussi un gros événement : un tournoi qui s'appelle “le Maroilles d'Or”. C'est quand même le seul tournoi qui pue... On gagne un fromage, forcément. Cette année, c'est l'équipe d'Amiens qui a gagné.



Il est ouvert à toute la France ?


Bien sûr ! Et même à nos amis Belges ! On est voisins ! On invite des équipes. Les premières éditions, on invitait 4 villes et on en faisait 3 par an. Mais en fait on n'a pas les moyens, donc maintenant on a réduit à une fois pas an. On fait un petit turn over pour pas que ce soit tous les temps les mêmes villes qui viennent. Je suis contente parce que notre format de mini tournoi a été repris depuis par d’autres villes qui n’osaient pas se lancer, comme Toulouse qui a maintenant son “Magret d’Argent”...


On va revenir à toi. Comment écris-tu? A quel moment de la journée, où... ?


Toujours sur mon téléphone, donc ça laisse une grande liberté d'endroits. Je ne décide pas vraiment de quand j'écris, mais j'aime bien le matin en prenant mon café, c'est souvent à ce moment-là que les idées se débloquent. Après, il n'y pas vraiment de règle en fait. C'est quand ça me vient. Je suis capable de me réveiller la nuit en ayant une idée et dans ces cas, toujours sur mon téléphone, je note pour ne pas oublier, parce que sinon le matin c'est parti !


Qu'est-ce qui t'inspire ?


Ndrix. Photo: Charlotte Tirion Winckler (c)

Je ne suis pas une grande revendicatrice des problèmes de société, de choses comme ça. Je suis plus tournée vers l'humain et les sentiments. C'est plus introspectif. Ça ne veut pas dire que je n'ai pas certains textes qui engueulent tout le monde, mais ça n'est pas mon créneau. Et je ne sais pas faire rire... En discutant oui, mais dans mon écriture, je ne sais pas faire. J'envie beaucoup les gens qui savent écrire des textes qui font rire.


Tu es plutôt sensible aux relations avec les autres?


Je suis très sensible et l’écriture me permets d’évacuer le ressenti que je peux avoir sur des situations ou des personnes rencontrées. J'écris aussi sur le handicap, par exemple, j'ai quelques textes, dont un sur Alzheimer. Voilà, des choses comme ça.


Te souviens-tu de ton tout premier texte ?


Oui, bien sûr que oui !


Il parlait de quoi ?


La gimmick c'était: “regarde le monde, regarde ce qu'on en a fait”. Ça parlait de tout ce qui va mal dans notre monde: la pauvreté, le climat, le manque d’humanité...


Il était engagé alors celui-là !


Oui, j'en ai quand même quelques uns. Il y en a aussi sur la condition des femmes. De temps en temps, j'ai des coups de gueule, mais ça n'est pas ma spécificité... Après, je ne te cache pas que ce sont ceux-là qui fonctionnent le mieux sur les scènes slam, évidemment. Mais, je garde avant tout mon côté humaniste... Mon grand kiff, c’est de faire écouter ce qui se passe dans le cœur et dans les âmes des gens. J’ai eu aussi le privilège de rencontrer un musicien de talent, Frédéric Marchand, qui a mis certains de mes textes en musique. On a fait un CD ensemble sous le nom de Metndrix. Une autre belle évolution !


Dernière question: qu'aurais tu à dire à quelqu'un pour lui faire aimer le slam, le pousser à le découvrir et à s'y plonger...


J'ai juste envie de dire: “le slam : l'essayer c'est l'adopter !”. Venez sur une scène slam ! Au début, on écoute, après on accepte d’être jury du tournoi La fois d'après, s'il y a un atelier d'écriture, on veut bien participer et on écrit son premier texte,on le lit en petit comité lors de la restitution. Et on finit à chaque fois par lire au micro le mois suivant ! Et la première fois où on a dit, c'est foutu on est mort, on y retourne... C'est comme ça., c’est un virus ! C’est pour ça d’ailleurs qu'on propose des ateliers d'écriture gratuits avant le tournoi ; ça alimente le cheptel de poètes ! Sinon, le slam, ça n'est pas seulement dans les cafés, les endroits fermés, les bibliothèques. Çà peut se faire aussi dans la rue, sur les marchés, dans les parcs ... Et donc on vient de faire un événement qui s'appelle « Lire hors les murs ». C'est un événement de déclamation et d'ateliers d'écriture sur les trottoirs, donc dans la rue. On a écrit sur plein de supports différents, sur des rubans, sur des cailloux, sur une cabine téléphonique.. Enfin bref, on a fait plein d'événements qui mettent le slam et l'écriture poétique en avant et dans d'autres lieux que ceux dans lesquels on l'attend en général.



Vous prenez toutes les initiatives qui vous passent par la tête en fait ?


Dès qu'on peut, qu'on a l'occasion de dire, on fait, oui, j'avoue. On slame d'ailleurs pas seulement pour un public averti, on va aussi dans les EPAHD, les écoles, les centres de loisirs ou même à l’université, auprès de personnes handicapées... Ces moments sont toujours des moments très riches. Bref ! A Lille, on slame partout et pour tous !




Un grand merci à la Ligue Slam de France, à toute l’équipe de Lille, notamment bien sûr à Ndrix pour sa disponibilité... Propos recueillis par #PG9


Tous les portraits sont regroupés ici:



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