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[Pourquoi Slamez-vous?] Coupe de la Ligue Slam 2019: Michel Dréano, Vernou

Slameuse/ Slameur: Michel Dréano (co-coach)

Equipe de: Vernou


Michel Dréano (C)

Pourquoi Slamez-vous?

Enquête auprès des slameurs sélectionnés pour la Coupe de la Ligue Slam de France 2019 www.ligueslamdefrance.fr



Vous êtes Slameur, là vous allez être coach de l'équipe de Vernou. Pouvez-vous me parler un peu de votre vision du slam en général...

L'équipe de Vernou pour la Coupe de la Ligue Slam 2019

Je pourrais dire que le slam, c'est comme le journalisme : « c'est bien parce ça mène à tout mais à condition d'en sortir… » Je vais rappeler rapidement les deux types de définition du slam, l'une qui se rapproche de l'étymologie hip-hop « rap/ slam » anglo-saxonne donc parler fort, se faire entendre... Et l'autre qui est « chelem », soit tournoi. Pour moi le slam est une forme d'expression qui valorise plutôt l'oralité, même si derrière il peut y avoir y avoir un soutien rythmique ou musical. Je dis toujours que j'ai commencé à écrire des chansons qui n'avaient pas de refrain qui étaient parlées chantées dans les années 70...Du coup, je faisais du slam sans le savoir. C'est en 2001/ 2002 que j'ai découvert le système slam, adapté par la France et importé des Etats-Unis. Ce qui m'a beaucoup séduit à l'époque, c'est que, outre que ça pouvait se passer dans un café de Belleville ou de Barbes mais aussi à la Coupole de Montparnasse, ça mélangeait les classes sociales, les générations et tout ça et aussi parce qu'on était à Paris, des gens d'origine, de langues, même si c'était francophone ou francophile, de langues différentes. Et il y avait une émulation, une stimulation, absolument extraordinaire. C'est vraiment ce qui m'a plu dans ce mouvement quand je l'ai connu à Paris. Ensuite, j'ai pu me rendre compte que le slam a été adoubé par le système médiatique et ceux qui font la mode, c'est à dire les médias et certaines personnes qui ont une certaine puissance de soft-power, et très très vite, j'ai pas encore bien compris pourquoi, ça s'est démonétisé. C'est devenu, comme le disent certains de ce même monde « du socio-cul de banlieue ! ». Les gens qui font l'actualité sont passés complètement à côté de ce qu'est ce mouvement de fond.


Et, pour moi, ce mouvement de fond, se passe en province. Parce que c'est la façon dont c'est organisé dans les cafés, les médiathèques ou même un peu partout, ou même dans des appartements... ça continue ce que moi j'avais trouvé formidable, c'est à dire ce brassage intergénérationnel et de classes sociales. Il y a des personnages extraordinaires, presque des saints laïcs, qui sont à la fois des poètes, auteurs, et qui en même temps, soit pour des raisons financières parce qu'on a tous besoin de gagner notre vie, soit par passion de la littérature de l'écrit, vont rencontrer des gens en difficulté que ce soit des gens dans une maison de retraite, dans des collèges spécialisés, que ce soit au sein de l'éducation nationale « classique » ou de l'agriculture. Ou même dans des prisons et qui avec ces gens-là font des choses extraordinaires. Ils les font écrire, parfois monter sur scène en mélangeant différentes populations. Par exemple, des gens que j'adore, Benjamin et Marion qui travaillent le slam comme des fous, qui ont un niveau extraordinaire et qui, par ailleurs, pour gagner leur vie travaillent avec des populations très disparates, les font se rencontrer et créer des choses ensemble. Par exemple, des jeunes de 4ème technologique avec des personnes âgées en EPAHD, ils montent des projets sur scène et là pour le coup ça créé vraiment du lien social. Il ne s'agit pas uniquement de se dire on a fait notre BA, non, ça créé une dynamique pour tout le monde parce qu'on a fait quelque chose, qu’on aécrit ensemble. Et ça, ça a vraiment une grande valeur symbolique et culturelle. Du lien quotidien et durable entre humains de tous âges, ce n’est pas si courant de nos jours.


Pour revenir à l'écriture elle-même, comment est-ce que vous écrivez ? Est-ce qu'il y a un plaisir particulier lié à l'écriture, au fait de coucher ses émotions, ses pensées sur une feuille de papier...

C'est difficile de répondre. Moi, j'ai toujours eu besoin d'écrire, depuis toujours. A 25 ans, j'ai commencé à écrire mes premiers textes qu'on pourrait appeler des « chansons slam », même si le mot n'existait pas. J'écris comme beaucoup de gens, j'imagine, quand je suis en proie à une émotion ou à un coup de gueule. Ca peut-être une résistance politique ; ça peut être aussi dans un cadre organisé. Par exemple, je me suis inscrit dans un atelier d'écriture de chansons où on se donne énormément de contraintes. J'aime bien avoir ces contraintes pour écrire, parce que ça structure. Les rimes sont des contraintes, par exemple, a priori. Mais, en fait beaucoup de gens sont tellement formatés par le système scolaire qu'ils n'écrivent qu'en rime alors qu'on ne leur demande pas forcément de le faire, c'est comme ça. En ce qui me concerne, j'ai d'abord écrit pour moi, ensuite j'ai gagné ma vie en écrivant puisque comme je vous l'ai dit, j'ai été journaliste. Là, c'est une autre forme d'écriture ou la contrainte est d'espace, d'angle et de style : langage compréhensible. Pour être le plus lisible, le plus fluide, je bossais des heures durant... Les idées me venaient en vrac et je passais beaucoup de temps à les restructurer. Personnellement, ça sort comme une vague et puis après je vais faire mon tri, ce qui demande plus de boulot parfois.. C’est presque dérisoire quand on sait que le papier du journal va servir dans les jours qui suivent à emballer les épluchures et finir à la poubelle.


Ce travail de journaliste qui est très intéressant en soi vous a-t-il apporté quelque chose pour l'écriture de chansons ou de poésies ?


Pour l'écriture de chansons peut-être dans la mesure où, souvent, on va raconter une histoire en 3 mn donc dans cette concision qu'on apprend dans le journalisme, cette efficacité, ce sens de l'attaque de la chute... Donc, oui ça m'a peut-être aidé à écrire certains types de textes de chanson, mais pour la poésie non. La poésie, ce que j'appelle la poésie poétique, c'est complètement différent. Même s'il peut y avoir dans la prose des éléments de poésie, et même parfois dans le journalisme ! Mais c'est pas le but. Le journalisme m'a quand même aidé quand il faut écrire des textes de slam en lien avec l'actualité, mais rien qui se démode plus vite que l'actualité donc il faut donc faire très attention. Je ne suis pas dans le dropin' name, j'essaie de donner le moins de nom possible, parce qu'il n'y a rien qui vieillit plus vite que ça. Je ne vais pas écrire un truc sur Hollande, Sarkozy ou Macron, je ne leur ferai pas cet honneur. Mais j'essaierai de trouver une autre forme pour faire comprendre de qui je parle et essayer d'être le plus universel, disons, c'est pas le mot, se débrouiller avec les mots pour faire en sorte que ça dure plus longtemps qu'un coup de gueule qu'on peut avoir dans une chanson détournée ou une goguette. Je cherche autre chose, je respecte le détournement des textes existants par le système de la goguette mais je cherche autre chose. La contrepartie de ça c'est que mes textes peuvent être parfois être jugés un peu trop denses ou trop cérébraux, mais j'assume... Si ça vous intéresse j'ai un site où j'ai mis mes textes de slam ou de chansons : www.micheldreano.org... Peut-être que ça illustrera ce que je viens de vous expliquer!


Un grand merci à la Ligue Slam de France, à toute l’équipe de Vernou, notamment bien sûr à Michel pour sa disponibilité... Propos recueillis par #PG9



Tous les portraits sont regroupés ici:



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