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[Plonger dans l’âme de...] Mood. Un papillon et des étoiles

Le naturel de certaines personnes se passe parfois de commentaires. Il suffit de les écouter, leurs mots sont simples, limpides, tout est cohérent dans un équilibre sensible entre le présent, le passé et l'avenir. Elles sont sur la route, elles suivent leur chemin. Notre discussion avec Maude ou Mood s'est passée en toute fluidité entre deux éclats de rire. J'ai revu un échange lointain avec une immense femme chanteuse. On parle beaucoup d'un pont entre les univers de Mood et de Bjork. Mais on peut sans doute aussi aller regarder du côté de chez Barbara. Lisez et vous comprendrez. Merci, Mesdames...


Mood. Photo: Benoit Méjean (C)

Bonjour ! La rumeur dit que tu es actuellement en train d'écrire et de composer des chansons...


Oui! J’écris et compose un peu en permanence. Là, je suis concrètement dans une dynamique de création pour une 2ème album. J'aime toujours avoir le choix et écrire différentes choses, donc je le fais. Ecrire dans une démarche de chanson populaire et en français, c'est assez nouveau pour moi donc je travaille, j’explore ces matières-là. J'aime être dans un processus de créativité constant, donc je me nourris de plein de choses pour ça... pour faire éclore de nouvelles choses.


Comment ces nouvelles chansons apparaissent-elles? Comment pointent-elles le bout de leur nez?


En général, ça part de mon état d'esprit, et ce qui est rigolo, c'est que Mood ça veut dire état d'esprit justement, Ca part de cette intention première là. Parfois, je vais avoir envie d'exprimer tel sentiment. Quel est le sous-texte ? Quelle est l'intention primaire, primale d'une chanson en train de naître? Parfois, c'est d’abord un texte qui va venir, un peu plus généralement, c'est d'abord une mélodie qui va épouser cet état d'esprit-là, cette humeur, cette atmosphère. Une musique classique ethnique m'a beaucoup influencée, c'est la musique indienne, la musique classique d'Inde du Nord. Ce qui lui est spécifique, c'est qu'on utilise des « Râgas ». Ce sont des échelles mélodiques qui représentent ou qui sont affiliées à une humeur, à une atmosphère, à une couleur. Même si je ne les utilise plus nécessairement et que je m'approche de la musique tonale, je pars vraiment de ça en fait : une couleur, un état d'esprit, une humeur, une atmosphère, une émotion première qui va guider la création d'abord embryonnaire d'une chanson et parfois tu vois venir une mélodie qui raconte quelque chose et le texte ensuite. Ou inversement. C'est un processus où les choses se complètent, parfois ça part aussi d'une grille harmonique, d'une suite d'accords, toujours d'une envie de musique à transmettre en particulier.


Mood by Christophe Courtois Amenature (C)

Et c'est solitaire ou tu fais ça avec d'autres ? T'es chez toi, toute seule à créer ?


En général, je suis toute seule à créer. Et sur ce deuxième album, j'ai eu la chance de travailler aussi avec d'autres talentueux artistes, auteurs ou compositeurs. Par exemple, sur les 4 premiers titres, Phil Baron, le frère de Zazie, est intervenu. Il lui avait composé les chansons que je préfère comme « J'envoie valser », « Chanson d'ami », « Encore heureux » ou « Adieu tristesse ». Il m'a composé une mélodie et une harmonie. Et puis j'ai utilisé deux textes que j'ai co-écrits avec un auteur qui s'appelle Fred Berry... c'est mon voisin. Il commence à écrire, il est dans un autre domaine que le domaine artistique, donc c'est rigolo, c'est une collaboration qui est née assez spontanément. Il m'a transmis deux textes qui m'ont touchée, que j'ai réadaptés, donc c'est une co-écriture; mais sinon en général, tout ce que je fais dans ce processus créatif depuis des années et notamment depuis un an, c'est vraiment une création solitaire.


Est-ce que tu te mets dans un état d'esprit ? Ou est-ce qu'il s'impose à toi ?


Alors, il n’y a rien qui s'impose, c'est juste laisser de la fluidité à ce qui doit s'exprimer... C'est laisser place à quelque chose qui surgit qui me traverse, par rapport à ce que j'ai pu vivre. Ca s'apparente un peu au travail d'un écrivain qui parfois met des bouts de lui, de son histoire personnelle, romancée, amplifiée, transformée quelque peu sous les traits d'un personnage dans un livre. Y'a un peu de ça. Il y a des échos qu'on trouve dans ce qu'on vit en tant qu'être humain, dans ce qu'on fait, des choses qui vont nous toucher, nous inspirer. C'est un travail d’adaptation : mettre son prisme là-dedans à travers quelque chose qu'on va pouvoir ressentir et qu'on va pouvoir sublimer ou amplifier par cet outil artistique merveilleux qu'est la chanson, comme la photographie d'un instant, quelque chose qui doit être court pour évoquer des choses assez profondes et en même temps personnelles. Quelque chose d'assez intime dans mon ressenti. Et souvent j'ai cette volonté de partir de l'intérieur pour l'emmener vers l'extérieur. Donc, quelque chose de très viscéral naît dans mon ventre : une émotion, un état d'esprit et je vais aller tirer les fils de ça, tisser quelque chose, pour le délivrer à l'extérieur de moi. Et la question, c'est « comment le public peut-il se retrouver là-dedans ? Comment rendre ça universel, accessible, comme parler de quelque chose que je ressens moi de manière très personnelle, mais dans lequel finalement chacun peut retrouver un écho... » C'est aussi tout un travail de partir de l'intérieur de soi, de l'organique, de l'intime, du viscéral, pour aller l'offrir à l'extérieur de soi et c'est un travail d'aller-retour comme ça du microcosme vers le macrocosme... De quelque chose de petit on va vers quelque chose de plus grand qui va à l'extérieur et qui finit par ne plus nous appartenir, parce que la chanson quand elle est terminée, ça y est, elle nous appartient plus, elle vit sa propre vie. J'aime bien cette idée-là...


C'est une question que je voulais te poser ! A qui appartient une œuvre en fait ?


Je pense que les artistes ne sont que des catalyseurs. Quand je compose, je me dis pas que c'est juste mon petit nombril qui détient un pouvoir incroyable de créativité ! Etre artiste, c'est être en capacité de se mettre en état d'antenne, de réceptivité à des choses qui nous traversent ou qui planent dans le monde. Il s’agit d’exprimer ça à travers ses propres couleurs, ses propres prismes et on catalyse quelque chose qui est là et à travers notre personnalité, qu’on rediffuse à notre manière à l'extérieur parce que la musique c'est quand même avant tout un état de communion. C'est quelque chose qu'on partage. J'aime bien cette idée-là qu'on est des transmetteurs, mais que, même si on a l'impression que ça vient de notre intimité, parfois c'est des choses finalement universelles, on est constamment dans ce jeu d'aller-retour. Je dis beaucoup on, c'est je, mais... voilà comment je vois les choses là-dessus.


Ca rappelle un peu ton expression du français miroir ?


Alors, le français miroir, c'était un terme que j'avais utilisé parce qu'à l'époque, j'aimais à pouvoir chanter dans un langage inversé qu'on ne comprenait pas intellectuellement, mais qui pouvait se réfléchir en miroir dans le cœur ou l'inconscient de chacun pour être dans l'incarnation de la voix-instrument. Je voulais délivrer des messages inconscients en laissant place juste à l'émotivité pure de la voix, du timbre, de la couleur (parce que je travaille beaucoup l'idée de recherche de timbre et de couleur) et effectivement l'idée du miroir, c'est l'idée de quelque chose qui se réfléchit en l'autre. Je pense que les êtres humains dans tout type de relation, tout type de rencontre, sont des miroirs les uns pour les autres, l'un pour l'autre, on peut vérifier ça dans plein de relations d’ailleurs. Et une chanson peut aussi être la réflexion du cœur d'un auditeur qui va ou pas dedans s’y rencontrer. J'aime cette idée-là, de pouvoir faire rejaillir avec peut-être un autre parfum, une autre façon de dire, avec d'autres mots, ce que l’autre sent. Aussi et souvent les chansons qu'on affectionne le plus, on se reconnaît complètement dans ce qui y est exprimé. Même si c'est dans un autre langage, ça va faire écho à des choses qu'on ressent, ça nous parle et c'est pour ça qu'on va être touché par une musique en général, qu'elle soit instrumentale ou vocale, d'ailleurs. Là, comme je travaille aujourd'hui sur la dimension du texte, c'est quelque chose d'encore plus exigeant. Je dois vraiment porter attention aux mots que j'emploie, à ce qui se dégage, à ce qu'ils génèrent en terme d'atmosphère, d'énergie, d'évocation... Donc c'est un travail encore plus profond que d'écrire de la musique purement instrumentale, pour moi, dans l'expérience que j'ai actuellement.


Le français miroir était donc une étape... Comment la décrirais-tu?

Le français miroir m'a permis de m'amuser avec ma voix dans toutes ses possibilités, parce qu'à la base, je me sens vraiment plus instrumentiste que chanteuse, dans l’approche de ma propre voix. J'aime utiliser cette voix comme un instrument et comme une porteuse d'émotion pure. C'est ça qui m'intéressait dans son expression. Et le français miroir me permettait à cette époque-là de lâcher le mental. J'avais envie de proposer des spectacles où on lâchait le mental, l'intellect, très présent dans nos sociétés occidentales, pour que les gens se permettent d'être ouverts à l'émotion pure, à la magie des couleurs, des timbres, juste pour recevoir sensuellement, physiquement, dans leurs oreilles, sur leur peau, l'impact d'une voix, d'un violoncelle, l'impact des timbres qui viennent raconter, nourrir et transmettre une émotion. C'était ça l'urgence à cette époque-là de ma vie et puis j'ai maintenant envie au contraire de m'adresser directement, de repasser par le message du verbe parce que je comprends combien c'est important dans notre société, maintenant. Et ça me permet d'aller vraiment à la rencontre de l'auditeur. Avant, je promenais mon monde, mon univers, je le présentais aux gens et il y avait une frontière qui restait, je proposais quelque chose de transe, fallait vraiment arriver à la transe pour que les gens lâchent et que c'est cette idée de communion arrive. Et là, j'ai eu envie d'aller plus dans la confidence, dans le fait de se livrer intimement et d'aller parler. Parler avec les autres. Je me suis beaucoup inspirée et interrogée sur le fait qu'à l'heure actuelle on a perdu l'esprit social, que permettait la musique. Mes parents racontaient qu'à l'époque de leurs grands parents, on faisait des veillées, des veillées musicales. Tout cet héritage-là, où la musique, avant, se transmettait par la tradition orale, aussi dans les musiques indiennes ou arabo andalouses que j'ai pu étudier c'est ça, mais aussi par des événements sociaux et quotidiens qui permettaient de rassembler les gens. Il fallait battre la terre battue d'une maison ensemble, on allait invoquer des chants et des danses et c'était aussi des moments où on pouvait raconter des histoires et transmettre des choses. Aujourd'hui, y'a – je suis pas dans le critique, je veux pas tomber dans le cliché de l'artiste qui est contre la société... - mais c'est vrai qu'il y a cette dimension de la consommation omniprésente. Parfois on va aller écouter un concert dans une grande salle avec les personnes avec lesquelles on est parti et on va pas forcément parler aux personnes qui sont autour de nous. Chacun va repartir de son côté. Et je me disais qu'avec la réintroduction du texte, y'avait des échos qui pouvaient se faire encore plus présents, qui permettaient aussi quelque chose de la confidence, quelque chose qui donne envie aux gens d'échanger de se raconter leurs histoires... J'aime bien toutes ces idées-là. Derrière. J'ai eu la chance, en solo, de jouer aussi dans des petits lieux qui permettaient ça. Qui invitaient à la confidence et au fait que les gens avaient parfois envie de rebondir sur une histoire qui était racontée entre la chanson, sur l'écriture de la chanson ou dans la chanson elle-même.


Et ça tu l'intègres dans ton processus créatif actuel ?

Y'a deux ans quand je commençais à écrire en français, oui. Je travaillais sur un spectacle qui s'appelait « le Cercle » et qui portait vraiment cette réflexion-là. Donc, c'était à la genèse de pourquoi j'ai commencé à écrire en français. Maintenant, je ne me pose plus ces questions. Je laisse faire ce qui vient, ce qui me traverse sur le papier... Oui, y'a toujours un souhait d'être dans un format de chanson populaire et en même temps, à travers ce format de chanson populaire, de transmettre ce que j'aime tant dans les musiques ethniques. Un peu comme représenter un maillon qui viendrait réconcilier d'un côté les musiques populaires et de l'autre les musiques un peu plus ethniques et expérimentales qui m'ont nourri jusqu'à maintenant, dans cette idée de décloisonnement, de case, d'ouverture et de rassemblement.


Comme un trait d'union...


Oui. C'est exactement ça. Etre un trait d'union. C'est beau d'ailleurs le mot « Union ». Et je pense qu'on en a besoin par les temps qui courent, c'est on ne peut plus d'actualité dans notre société qui se met en état d'urgence.


Et c'est justement le symbole de l'instrument si particulier que tu utilises, l'harmonium indien... Visuellement, il a quelque chose de très fort.


Oui. C'est vrai qu'avec le soufflet y'a un va et vient. De moi, de mon cœur, je vais jusqu'à vous, c'est un instrument indien mais qui a été amené par les occidentaux en Inde (dérivé de l’organum anglican), donc, il a cette histoire de la double culture et d'une double philosophie qui peuvent s’inspirer, de deux cultures qui ont tant à s'apporter l'une l’autre, entre l'Orient et l'Occident.


Donc, les œuvres sont en train de se faire actuellement...


Moi j'appelle ça musique, tu sais œuvre, c'est... Je suis pas Mozart ! Je suis artisan de la musique, comme tout le monde. En fait, y'a déjà plein de chansons qui sont là, les 4 premières ont été posées en studio, un clip est prévu pour bientôt, mais je continue tout doucement de faire... C'est comme l'alchimiste qui va pendant des heures et des heures, des jours et des années, travailler sa quête jusqu'à arriver à la pépite d'or, mais d'abord, il y a tout ce qui est noir à faire sortir, les petits charbons, les petits éclats avant que les pépites n'arrivent. Moi, je pense que la chanson est un art qui se travaille quotidiennement, comme on va travailler son instrument, comme on va polir une pierre, chaque jour écrire des nouvelles chansons, c'est quelque chose qui permet de grandir, de cheminer et d'arriver petit à petit à des moments de grâce, de magie... Y'a des fois où on se sent pas inspiré, on a l'impression de refaire la même chose, et puis des moments où on aura vécu quelque chose, on aura dépassé quelque chose qui est en nous, et une espèce de mini miracle qui arrive, et ça fait du bien ! C'est plutôt que ça fait partie de mon métier de rester en état de créativité quotidienne. Qu'un disque soit terminé ou pas, c'est quelque chose qui reste là à nourrir.


Et la chanson qui se façonne au fur et à mesure de ton travail, à quel moment est-ce que tu sens qu'elle est prête?


Je pense que dans l'art, il y'a cette éternelle question de quand est-ce que c'est terminé ! Parce qu'en étant très exigeant y'a des choses qu'on pourrait toujours se dire qu’on peut encore améliorer. Je travaille vraiment dans l'énergie du 1er jet, de la découverte, que ça reste toujours ludique en fait. Donc je compose et je maquette dans mon logiciel la chanson, avec son essence première, parfois je rajoute quelques arrangements, mais je la laisse comme ça, je la propose à mon réalisateur, ou je la laisse mûrir dans un coin et parfois, 2 ans après ou plus tard que ça, des fois c'est vraiment des années après ou tout de suite qu'elles vont naître dans la matière et sur scène...


De la même manière, comment naît une équipe ?


Ca, c'est de rencontres, et puis après c'est selon les besoins du moment, les envies du moment. J'ai eu la chance de travailler dans les années passées avec des vraies équipes sur scène, avec des groupes, je montais des équipes de musiciens, parce que j'avais les conditions pour, j'avais travaillé sur des dossiers de subventions qui permettaient ça, (faut pas oublier ce paramètre-là,) et ça naissait de rencontres humaines et d'envies de raconter certaines choses avec un propos particulier. Par exemple sur « Do Om », mon 1er album, j'étais entourée d'un quintet de musiciens, qui venaient principalement du free jazz, parce qu’ ils ont cette grande liberté-là, cet amour, des timbres, du son et on avait envie avec des instruments dits « classiques » (contrebasse, violoncelle, percussions, trompettes...) de détourner ces instruments-là pour aller cueillir d'autres façons d'exploiter les timbres, ça rejoignait ma démarche vocale. Sur « le Cercle » c'était quelque chose d'un peu plus rock progressif dans l'approche, et aujourd'hui, c'est aussi des rencontres qui se font naturellement. Y'a des personnes qui se sentent peut-être appelées ou touchées par mon travail et qui me proposent des collaborations. Par exemple, je viens de tourner un clip sur mon morceau « l'Appel » avec la boite de production audiovisuelle « Capsus » (www.capsusfilms.com) et c'est des gens qui ont vu ma prestation à la télévision quand j'étais dans « The Voice » l'année dernière. Et le réalisateur Guilhem Machenaud s'est senti très touché, il m'a contacté et il m'a dit que c'était la première fois qu'il contactait un artiste qu'il ne connaissait pas pour proposer la création d'un clip, parce que c'était quelque chose qui avait résonné fortement en lui dans ma démarche, donc c'est chouette.


[Avant-Première] Mood par Capsus (C)

Avec mon, réalisateur, Christophe Voisin Boisvinet, c'est pareil, grâce aussi au passage à “The Voice”, c'est quelqu'un qui a découvert mon univers, ma façon de m'exprimer et on a commencé à travailler ensemble sur cet album dans ces conditions-là. Yan Péchin, c'est pareil, c'est aussi une rencontre qui a donné lieu à de superbes concerts sur scène et ça continue de temps en temps, en plus de son agenda déjà très chargé avec Rachid Taha. A chaque fois, la musique, c'est des histoires de rencontres, mais je suis dans un cycle de vie où je travaille beaucoup seule et ça me permet d'aller plus loin. Je suis dans une quête de l'essentiel. Avant j'explorais un peu toutes les limites tous les horizons possibles, toutes les extensions possibles d'un propos musical, avec la complicité d'autres musiciens et aujourd'hui le fait de vraiment faire naître ces choses-là en général seule, ça permet vraiment d'aller à l'essentiel dans « Qu'est-ce que je veux dire ? » Ne pas aller trop mettre de tout dans tous les sens pour revenir à la base de « qu'est ce que j'ai envie de donner à entendre ». Y'a une voix, un harmonium, y'aura des sonorités électroniques qui vont accompagner ça, l'essence même des influences ethniques qui sont présentes et du format aussi populaire et occidental, avec des choses plus numériques, la rencontre de tout ça, avec aussi la place laissée au silence, aux espaces, j'aime l'idée du minimalisme, quand quelque chose existe dans son plus simple appareil, il peut être ensuite modifié. Et, parfois, partir des artifices, ou de tous les possibles, c'est magnifique, mais ça va donner peut-être moins d'exigence dans l'essentiel du propos qu'on pouvait faire, donc voilà. C'est des réflexions qui m'intéressent fortement en ce moment et je suis ravie quand je peux partager la musique, la jouer, la vivre avec d'autres et quand j'ai la chance de pouvoir chanter aussi des compositions créées collectivement, comme c'est le cas de la chanson dont je parlais tout à l'heure, écrite par Phil Baron, Fred Berry et moi.


Tu parles de la manière dont le réalisateur t'a abordée pour le clip, tu dis qu'il a été sensible à ton message, et si on regarde les titres de tes chansons : « L'appel », « Le Message », « Ton écho »... C'est des bouteilles à la mer que tu lances !


Exactement, c'est que ça! Je pense d'ailleurs que l'album va s'appeler « l’Appel », parce que chaque chanson en est un... « Le message », « Ton écho », des appels de communion, de retrouver espoir, des appels à aimer... Y'a une chanson qui s'appelle « Le Courage d'aimer », c'est un sujet fortement d'actualité. Ce sont un peu des appels, c'est aussi parce que ce sont des chansons en français, que je chante dans ma langue maternelle pour la première fois... Dans mon pays. Je crois que c'est intéressant. Des appels, voilà. C'est ça.


Session acoustique... “MOOD: L'appel” (Du son dans mon salon) https://www.youtube.com/watch?v=FZ3w922gm-Y

Qu'est ce qui pour toi a été le plus utile comme apprentissage?


C'est difficile de résumer, mais quand je prends ma casquette de pédagogue, je dis toujours : « le travail de la voix est un travail de la voie » et je pense que plus on est amené à se rencontrer soi-même et à travailler sur soi, parfois même avec différentes formes de thérapie, de philosophie, de rencontre avec soi tout simplement, c'est quelque chose qui nourrit énormément, qui permet de cheminer, d'approcher les choses avec un nouveau regard. Etre dans l'écoute du ressenti, c'est quelque chose de fondamental pour être dans un rapport constamment juste, incarné, charnel avec la musique, quelque chose qui reste toujours organique, toujours sincère. Que la musique soit vraiment un reflet sincère de là où on est. De qu'est-ce qu'on aime à partager, à ressentir et à faire ressentir. Tu peux pas tricher. Sinon, c'est pas intéressant en même temps. Donc plus on va s'accorder avec soi-même à l'intérieur, plus le reflet de notre musique sera juste. Il y a d'ailleurs une pièce dans un violon, qui s'appelle « l'âme ». Elle est à l'intérieur du violon, on ne la voit pas, elle permet aussi de le faire sonner et moi je dirais que avec l'instrument de la voix, c'est pareil, comment on s'accorde avec son âme, avec ce qu'on est, en rencontrant qui nous sommes, c'est la quête d'une vie aussi, c'est passionnant, pour aller offrir ça dans sa musique, dans son art ou dans tout ce qu'on fait...


Mood par Margaux Martin (C)

Cette leçon là est spirituelle...


Oui, je pense qu'on peut tout à fait dire que c'est une forme de spiritualité. La spiritualité, c'est quelque chose d'intime, qui n'appartient à aucune case, mais qui se cultive de façon personnelle. Il n'y a pas une vérité qui existe, chacun peut en découvrir des multiples en fait. Et c'est ça qui est intéressant. C'est un cheminement. Se rencontrer. Aller vers son propre miroir en nous-même, pour pouvoir offrir à l'extérieur avec encore plus de justesse, notre éclat. Notre message, notre empreinte...


Y-a-t-il des choses que tu t'interdis ?


J'essaie de m'interdire le mauvais goût !... Y'a une ligne avec Mood, avec ce personnage artistique, qui est moi, avec ce que j'aime à y faire sonner. Dans d'autres créations musicales, j'ai pu m'ouvrir des espaces de musique, peut-être plus humoristiques. Je crois qu'avec Mood, je suis dans un sens respectueux, assez flamboyant. J'ai envie de transmettre de l'espoir. Parfois, je m'interdis, quand je suis trop dans la tristesse dans ce que j'écris, parce que j'ai vraiment envie de donner de l'espoir ; mais après, je ne me censure pas. Je laisse toujours les chansons éclore et après je fais des choix. Je m'autorise plutôt, quelque chose qui va vers le partage. Je sais pas si je m'interdis des choses...


Si tu devais mener un combat, quel serait-il ?


Le courage d'aimer. C'est un nouveau titre de chanson, mais ça résume ça. Laisser rayonner ça en fait. On est dans un monde qui va à toute vitesse, très auto-centré, très égoïste, c'est devenu presque ridicule ou stupide d'aimer, alors que c'est l'essence de toute chose. C'est ce qui fait qu'on est si divisés actuellement sur notre planète et qu'on en perd le respect de la terre, le respect de nous même, le respect des autres. Je crois que ça se résume bien dans cette phrase-là.


Combien de temps par jour travailles-tu ta voix ?


Uniquement ma voix, c'est plutôt des périodes en fait. Je vais plus travailler sur moi-même... et ma musique dans sa globalité. C'est à dire que parfois je vais travailler le chant indien, le matin, par exemple, mais je ne suis plus dans une rigueur, où tous les jours, ça va être tant d'heures par jour... Ca, je le faisais avant, dans un processus d'étude. Par contre, je m'autorise des moments de stage. Là, je vais bientôt participer à un stage sur les musiques d'Anatolie, chants turcs et kurdes, je continue souvent à me former. Sur des temps de rencontres, ou dans mon travail quotidien, y'a des choses que je vais reprendre, notamment avec la pratique du dhrupad (ndl chant classique hindoustani) etc... Mais c'est plus un travail dans la globalité: l'instrument, la production musicale, en ce moment, c'est plutôt ça mon axe de travail.


Un mot de la fin ?


Chacun a le choix d'affûter son propre outil pour transmettre son message avec l'objet qui lui convient. Moi, c'est la musique, mais il en existe plein d'autres et je pense que chacun peut diffuser son message. La musique et les rêves appartiennent à tous... A chacun de se réaliser, de réaliser ce qui lui tient à cœur.


Mood et Lilith par Margaux Martin (C)




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