C’est un Festival qui commence dans des lieux institutionnels variés avec des artistes venus du monde entier, passe par des lieux atypiques pour des soirées surprises et se termine en apothéose en envahissant les bars de Beauvais pour plus de 30 concerts gratuits... Bref, vous l’avez compris, “le Blues Autour du Zinc” est une grande fête depuis 24 ans! Laurent Macimba, qui en est à l’origine, nous explique tout... Ce -très- sympathique échange vient clore (ou pas) notre série sur le sujet commencée avec Gaëlle Buswell et Laura Cox. Bonne lecture!
Le Blues autour du zinc :
Bonjour Laurent ! Enchanté. La première question qui me vient à l'esprit est la suivante : pourquoi le blues et pourquoi vous?
Bonjour Philippe. Pourquoi le blues ? Parce que j'aime les musiques afro-américaines et que le blues est une des matrices des musiques actuelles. J'aime aussi la soul, le Rythm and blues, le gospel, la country, le jazz... Ce que j'aime en particulier, c'est que c'est une musique de club, donc de proximité et c’est le lien avec ce que je fais. Pourquoi moi, justement? Je suis fils de cafetier de limonadier, on est issus du Nord de la France. A l'époque où je vivais dans le Pacifique, mon père est décédé. Je suis rentré pour reprendre le café familial et j'ai commencé à organiser des concerts le dimanche après-midi... c'était il y a 25 ans ! Un jour, j'ai eu un problème de nuisance sonore pour ces dimanche après-midi. Ca m'a révolté. Je me suis dit qu’il fallait faire évoluer les mentalités. Donc, il y a 24 ans, j'ai créé un Festival, Le Blues Autour du Zinc. C'était à la fois un projet culturel et économique pour rassembler et tisser du lien...
Donc le projet vient des bars...
Ca vient effectivement des bars. Et puis, je connais bien les Etats Unis, il y a plein de clubs. J'adore Nashville il y a des lieux de 80 à 150-200 places grand maximum. Ca ce sont des ambiances que je défends.
Dans les clubs où le rapport avec l'artiste est immédiat!
Voilà, c'est direct, oui, on est bien d'accord. C’est de la proximité. Et on en a besoin de plus en plus.
Donc, là on en est à la 24ème édition. Quelques mots pour la présenter?
Je suis content d'ouvrir le festival avec Yarol Poupaud, une vieille connaissance pour moi. Dans les années 90 il a créé avec FFF avec Marco Prince, c'est lui qui, sur les deux dernières années, tournait avec Johnny Halliday. C'est un super guitariste et un mec de scène... Ensuite, on est au théâtre avec les Rainbreakers, un jeune groupe anglais qui vient pour la 1ère fois en France, c'est un des coups de cœur de Festival avec Deva Mahal, la fille du légendaire Taj Mahal...
Justement, une des caractéristiques du festival, c'est d'aller chercher de nouveaux artistes et de leur laisser du temps pour qu'on les découvre.
Oui, c'est à dire que j'aime bien aller chercher des artistes qui viennent pour la 1ère fois en France. Il n'y a aucun intérêt à prendre un catalogue de boite de booking pour regarder ce qui tourne en France sur le mois de mars. On travaille quand même avec pas mal de boites françaises, mais j'aime bien aller chercher d’autres artistes qu'on ne voit pas partout. On a sorti un livre pour les 20 ans du festival qui explique tout l'historique du festival et notre manière de faire et de voir les choses...
Comment trouvez-vous ces pépites ?
80% des artistes de la programmation, je les ai vus en concert live. Je vais souvent dans le Nord de l'Angleterre, Manchester, Liverpool, Leeds, à une époque j'allais aussi beaucoup dans les pays scandinaves, Norvège, Danemark etc. Et puis après on a aussi une certaine expérience et on travaille en réseau avec d'autres collègues. On ne peut pas être partout et financièrement, ça n'est pas facile non plus. Mais j'ai une grade attache à toute l'histoire musicale dans le nord de l'Angleterre. Il y a des artistes exceptionnels. Vraiment. J’y vais tous les ans depuis 16 ou 17 ans. Et, par le passé, on a eu plein d'artistes qui sont venus chez nous, qui n'avaient jamais joué en France et qui depuis ont continué leur chemin
En France, quels sont les lieux magiques pour le blues ? Les clubs mythiques ?
Pour moi, l'une des références reste Cognac Blues Passions, le festival de Michel Roland en Juillet, c'est pour moi l'un des plus gros festivals en France et c'est une référence.
D'ailleurs Gaëlle Buswel y est passé avec beaucoup de succès plusieurs fois.
Tout à fait. Après on a tous le même problème, lui est sur 5 jours, moi sur 7, on ne peut pas faire que du blues et tu ne peux pas remplir aussi des grosses jauges qu'avec des blues men tout en gardant une certaine cohérence artistique, on essaie d'ouvrir un petit peu. Chez nous, il y a toujours une ouverture. Et en clubs, il y a le New Morning (Officiel), plein de salles sur Paris (comme feu “Aux Petits Joueurs” -NDLR), plein de lieux un peu partout.
Il existe une fédération des Clubs de Blues ?
Il y a une espèce de fédération de gens qui aiment le Blues, je crois, mais je n'en fais pas partie, je suis beaucoup plus ouvert, ils sont très spécialisés quand même.
Le festival prend plein d'initiatives pour essayer de développer le public du blues... Vous pouvez nous parler du projet de “Live Box Tour” ?
Alors, j'ai eu cette idée quand j'ai observé la mode des food trucks qui te permettent de manger, de pouvoir faire manger des gens là où ils sont. Nous, on avait un magic mirror pendant des années, des caravanes loges etc. et donc, je suis dans l'idée soit d'importer des caravanes américaines des années 50 ou d'en faire fabriquer sur mesure par rapport à un mec qui fait ça en Hollande. L'idée, c'est que ça soit des caravanes loges qui se transforment en scènes avec une ouverture sur le flanc, entièrement équipées en son et en lumière. Ca nous permettrait de cibler un peu plus la ruralité et d'aller chercher les gens là où ils sont, plutôt sur une période plus estivale, à partir d'avril - mai – juin. C'est un projet important qui devrait se mettre en place normalement en 2020 ou 2021. 2020 pour nos 25 ans si possible. On y travaille sérieusement.
C'est un super projet ! Bravo. Et du coup vous avez un itinéraire de prévu ?
Pour l'instant non. Le plus important reste le projet en lui-même, parce qu'une caravane comme ça, équipée en son et lumière, on est à peu près à 150,000€. Donc, c’est très lourd... mais on a des partenaires qui nous suivent et il faut juste qu'on voit avec le fabricant, je ne veux pas me tromper. Quelqu'un est en train de voir pour la sonorisation, lumière... C'est une caravane qui serait vraiment découpée, ouverte sur le flanc, mais il faut bien sûr qu'elle puisse se refermer... Vus les enjeux financiers, je préfère ne pas me tromper sur le projet.
Pouvez-vous nous parler des concerts secrets ?
On fait ça depuis 4 ans. C'est une idée qui me plaît bien. Les gens paient 15€, ils voient deux groupes et ils ne savent jamais lesquels. On ne lâche rien. Il y a quelques années, on a eu des gens comme Poppa Chobby, plein d'autres gens, connus, moins connus. Cette année, on a deux “Secret Gigs”. Un le dimanche 17 mars, dans une chapelle de 150 places, la Chapelle Rostropovitch, un lieu magnifique, c'est quelque chose qui d’assez électrique avec un groupe américain et un groupe anglais. Et le 2ème est beaucoup plus acoustique, jeudi 21 mars. C'est au Mudo, dans la salle couture du 1er étage et c'est super beau. Comme il y a des œuvres, on ne peut pas se permettre de faire des choses trop électriques donc on est sur des choses très acoustiques.
Vous cherchez à dépayser les gens à la fois par la surprise de la programmation et par le cadre...
Oui et puis c'est lié à ce que je vois dans d'autres pays du Nord de l'Europe au niveau culturel. Les gens sont beaucoup plus curieux musicalement. Ils n'hésitent pas à aller voir des groupes qu'ils ne connaissent pas. Chez nous, je ne veux pas dire qu'on est plus formatés, mais c'est vrai que si ça ne passe pas à la télé... Je ne sais pas si on est plus conditionnés ou c'est les gens sont plus curieux ou si c'est culturel, je n'en sais rien, mais c'est comme ça. Donc, c'est aussi pour essayer d'aller chercher les gens. Et aussi, j'ai une idée, c'est un truc qui me tient particulièrement à coeur, je te fais une révélation... 2020, c 'est les 25 ans du festival. Je vais tout faire dans le cadre d'une nuit secrète pour avoir une tête d'affiche internationale... Je veux qu'on l'ait sur une grosse scène et qu'il/elle puisse venir faire un concert de 30-40 minutes pour que tous les gens qui ont l'habitude de venir depuis des années sur ces jauges de 150 places en payant 15€ sans savoir... qu'un jour, ils tombent vraiment sur une tête d'affiche de renommée internationale. C'est un de mes rêves.
C'est beau les rêves !
Oui, c'est ce qui nous fait avancer, continuer. Bien évidemment.
Juste pour conclure, la scène Bues a évolué vers Beauvais et alentours depuis 24 ans ?
On a un groupe amiénois qui s'appelle “Massto”, on les garde plusieurs jours, et on a un autre groupe de qui s'appelle “Sweet Scarlett”, c'est hyper frais, vachement bien fait, c'est plus blues rock, d'un très très haut niveau. A côté, on a bien évidemment, des coups de cœur sur la scène “Blues au féminin”: Gaelle Buswel et Laura Cox, on n'est pas vraiment sur du blues mais c'est du haut niveau et ce sont deux nanas qui jouent divinement bien. On est vraiment fiers de les avoir chez nous.
Et elles sont adorables.
Vous savez, avec l'expérience, pour moi ce qui est le plus important c'est la relation humaine. Et elles deux sont adorables, elles ont tout compris, elles sont ouvertes sur les gens, sur la vie. C'est que du bonheur !
Vive le Blues ! Bravo pour tout ce que vous faites et bon Festival...
Merci à Damien de l’équipe de “Blues Autour du Zinc”. Propos recueillis par #PG9
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