Il parle toujours très sérieusement de cinéma, mais toujours avec passion et les yeux qui pétillent. Jérôme Baron a pris la Direction Artistique du Festival des 3 Continents de Nantes en 2010 et continue à explorer avec exigence (et curiosité) les films et documentaires d'Afrique, d'Amérique Latin, d'Asie... sans hésiter à aller regarder partout où naît un cinéma différent, sans hésiter, non plus, à tendre la main à d'autres formes d'expression artistiques, parce que, comme il l'explique: "l'art et celui du cinéma en particulier sont un mode sensible de relation au monde". Venez avec lui et son équipe, ensemble, ils ouvrent des multitudes de portes avec le désir chevillé au corps de montrer le chemin. Bonne lecture
Enchanté Jérôme. Nous allons parler ensemble du Festival des 3 Continents, mais nous allons commencer par parler de vous... Le cinéma est votre première préoccupation, votre première passion?
Enchanté Philippe. Mes enfants occupent aussi une place essentielle dans ma vie, naturellement, mais sinon, oui, le cinéma est bien au centre et depuis longtemps. Dès l'âge de 16 ans j'ai su que ma vie passerait par là. Pas du tout, et très clairement, dans l'ambition de faire du cinéma moi-même : c'est une envie que je n'ai jamais vraiment eue. Ce non-désir de faire film s'est confirmé très tôt puisque j'ai eu l'occasion de quelques petites expériences de tournage autour de 19-20 ans et ensuite un petit peu à la fac. La fabrication du film est un endroit dont j'ai tout de suite vérifié, que ça n'était pas ma place : ça ne m'intéressait pas beaucoup. Sur un tournage, tout ce travail de patience, de mise en place, de temps morts apparent m'ennuyait terriblement ! Ce ne sont pas de vrais temps morts puisqu'on voit bien que tout le monde est occupé à faire tout un tas de petites choses indispensables à la bonne fabrication du film, en tous cas à atteindre les objectifs du metteur en scène et de son équipe, mais ça m'ennuyait affreusement... En revanche, j'avais régulièrement vu et entendu des gens parler de cinéma et cette place qui consistait à être entre les films et le spectateur était une place qui m'intéressait beaucoup. J'avais du goût et du désir pour ça.
Vous vous voyez comme un passeur en fait ?
Oui. Je compare souvent mon boulot à quelqu'un qui, au restaurant, essaie d'amener le bon plat à la bonne température au bon endroit et à la bonne heure. C'est à la fois une ambition très modeste, mais c'est à cet endroit-là de la carte que je me sens le mieux, indépendamment du fait qu'on choisit quand même ce qu'on donne à manger aux gens, qu'il faut y avoir réfléchi avant, savoir pourquoi on a envie d'être là. Moi-même le cinéma m'a été d'une certaine manière transmis et d'une manière plurielle dans mon itinéraire, je suis un enfant du cinéma par la télévision : ce qui a nourri ma culture cinématographique d'abord, c'est le Ciné-Club de la télévision française. Dans les années 70-80, j'ai découvert non seulement le cinéma classique américain, français et quelques films européens que l'on ne voyait pas beaucoup en salle et puis progressivement depuis les 3 Continents et d'autres choses attrapées ici ou là, par des cassettes vidéos, d'autres films passés au cinéma de minuit, tout un pan du cinéma moins visible ou accessible qui passait effectivement par l'Asie, l'Amérique Latine, l'Afrique. Cela a renforcé mon désir aussi d'élargir mes horizons, de mettre un peu à l'épreuve des certitudes, des convictions, des goûts en les relativisant à travers le regard porté sur d'autres films.
Ca veut dire que pour vous le cinéma a un rôle particulier à tenir dans la société ?
Je ne sais pas, mais je sais que mon goût du monde, ma curiosité pour ce qui m'entoure ont été fondamentalement nourrie par ça, comme ça l'a été aussi par la littérature, la peinture, la musique... L'art et celui du cinéma en particulier sont un mode sensible de relation au monde. Et, indépendamment de me donner une manière de regarder les choses - les films en ont tellement qu'il n'y en a pas une qui prévaut sur une autre. Depuis mes 17 ans, je vois 300 à 350 films par an, si ce n'est plus, j'ai eu le temps non seulement d'aiguiser mon regard sur le cinéma et de me dire, ça c'est intéressant, ça pas tellement... On tisse des liens entre ces films qui font que derrière l'histoire qu'on peut en raconter, on a aussi une histoire intime, personnelle, avec des œuvres et des auteurs. C'est un aller-retour qui nourrit un désir insatiable pour ce qui m'entoure, pour les gens, les mouvements autour de moi, les voix aussi etc...
Le filtre de votre analyse du monde, c'est un film ?
Non, je ne dirais pas ça. Si je voyais le monde comme un cinéaste, je pense que je ferais des films. Je ne pourrais pas résister à cet appel-là d'aller faire des images de ce qui m'entoure, or je ne fais quasiment jamais de photographies ou de choses comme ça. J'ai une mémoire beaucoup plus sensorielle des choses qui m'entourent. Ce sont plutôt des odeurs, des sons, des impressions, etc... Elles sont très vivantes, j'en ai une bonne collection dans ma petite tête. Mais le film joue effectivement un rôle de prisme par rapport à ça, est un catalyseur de beaucoup de choses, de sensations, d'idées, de récits, de voix, de corps, de présence... De temps aussi, parce qu'il y a plein de temporalités au cinéma ! C'est une machine à explorer le temps absolument fabuleuse, pas seulement dans un rapport passé/ présent mais y compris de creuser le réseau des présents dans le présent... C'est fascinant. Arlette Farge, grande historienne française dit que le cinéma a été la langue maternelle du XXème siècle. Ce qu'elle entend par là c'est que on a, à travers les films, une capacité à reconnaître ou à voir le monde de manière presque innée ou naturelle. Que tout le monde sait ça, on le sait tous et c'est peut-être pour ça qu'on a tous un désir plus ou moins fort de cinéma. Aujourd'hui, ça serait d'un snobisme absolument délirant de dire : "je déteste voir des films". Ca se faisait beaucoup dans les 30's, 40's, 50's. Le cinéma était pour beaucoup d'intellectuels un objet culturel assez méprisable, qui s'adressait aux masses et qui forcément les manipulait... Ils le voyaient comme un lieu où on affirmait des messages auxquels tout le monde devait répondre ou en tous cas adhérer. Cette critique existe depuis bien longtemps et je ne veux pas dire qu'elle n'est pas, parfois, fondée. Mais, ce que j'aime dans le cinéma, c'est que c'est un lieu de partage. Les gens aiment voir des films et on voit bien ce qui se passe quand certains deviennent de vrais phénomènes sociaux vus par des millions de personnes. Ce n'est pas tant la valeur du film qui importe que ce que ça implique : à un temps t, les gens ont eu envie de partager une représentation des choses, quelle que soit sa valeur, à un même moment. Ce truc incroyable de rassemblement fait que, autour d'un film, on a encore la possibilité de retrouver inconsciemment la possibilité de faire corps collectivement. Malheureusement, aujourd'hui, la plupart des grands succès populaires sont des très très mauvais films. Il n'en reste pas moins que j'ai toujours été fasciné par la dimension, la valeur d'un grand cinéma populaire universel et aujourd'hui ce cinéma-là est vraiment en berne.
De tous les films que vous avez vus, y en aurait-il un dont vous auriez souhaité qu'il devienne un socle de génération ?
Les films qui pour moi ont cette valeur sont pour la plupart des films qui ont été réalisés avant ma naissance... C'est donc un tout petit peu compliqué de trouver des exemples dans le cinéma contemporain. Je pense que cette puissance mythologique de la fiction, le cinéma qui a le plus projeté cette idée-là, c'est le cinéma américain. Et, pour moi, il a toujours été absolument fondamental : je suis un hollywoodophile presqu'indécrottable. Je revois mes classiques US quasiment tous les ans, j'en ai vu beaucoup, je continue à adorer ça et à me dire qu'il y a quelque chose du cinéma qui est passé par là d'abord. Serge Daney a une belle manière de résumer ça, il dit : le cinéma m'a appris une chose, c'est qu'il y avait deux portes. Il y avait cette porte que tout le monde empruntait nécessairement, c'est celle qui nous conduit aujourd'hui malheureusement exclusivement aux multiplexes, mais c'est une porte ouverte à tous. Et puis il y avait à côté autour de cette grande porte qu'on doit absolument emprunter sinon on ne comprend rien à ce qu'est le cinéma je crois, et le grand cinéma américain, celui des grands auteurs des Ford, Hitchcock, Lubitsch, d'Howard Hawks, de Raoul Walsh... c'est cette porte-là, d'abord. Ce qui fait qu'on rassemble dans une même salle des gens de tous horizons sociaux, culturels et autres... et qu'ils partagent du film une expérience dont je pense qu'elle est commune. Ca, c'est extrêmement précieux. Et puis, il y a les portes dérobées avec des choses qui se donnent peut-être un peu plus difficilement à voir, mais qui assurent un approfondissement de cette première ligne d'horizon pour dire : regardez, sur cette ligne d'horizon, il y a plein d'autres points et ces points sont des régions à la fois imaginaires et très concrètes que d'autres se sont engagés à explorer. C'est comme ça que le cinéma n'a cessé de se renouveler. Je pense que la Nouvelle Vague est assez exemplaire de ça dans le cinéma français. D'un côté, on voit bien que ce qui les a nourris, ce sont les grands classiques du cinéma US et quelques auteurs du cinéma français comme Renoir et d'autres ou les Dreyer etc.. Et puis, à côté ils vont faire quelque chose qui a priori dans un premier temps a l'air en rupture totale avec ça. Or, c'est fondamentalement nourri par cette connaissance, disons, du cinéma grand public.
On a beaucoup parlé du cinéma US, et justement cette année, il y a toute une rétrospective du cinéma noir US au Festival des 3 Continents. Parmi les portes dont vous parliez, quelle est la place des cinématographies de ces parties du monde (Asie, Afrique, Amérique Latine)? Quelle porte représentent-elles ?
Je suis venu la première fois au Festival des 3 Continents à 16 ans, par accident. Ce jour-là, j'avais décidé de sécher les cours et donc, je me suis retrouvé aux 3 Continents à voir un film sri-lankais, puis un film japonais... J'avais déjà aperçu du coin de l'oeil un film de Mizoguchi et un film de Ozu au Ciné-Club de Claude Jean-Philippe sur Antenne 2 à l'époque et j'avoue que j'avais été assez désorienté et fasciné à la fois par ce que je découvrais. Le Festival a été pour moi à un moment donné une occasion absolument inédite et précieuse de vérifier une intuition, que non seulement le cinéma ne s'arrêtait pas à l'Europe et à la France en particulier et au cinéma américain mais qu'il y avait une autre carte à mettre à jour. J'ai trouvé là un terrain propice pour élargir mes horizons cinématographiques, j'y suis longtemps venu tous les ans jusqu'à ce que je quitte Nantes pendant quelques années et avant d'y revenir et d'y avoir une part plus active. C'est vrai que les 3 Continents ont été une porte extrêmement précieuse pour moi, je dirais, d'affermissement de ma vocation cinéphilique.
Comment définiriez-vous les esthétiques des 3 Continents dans cette carte-là?
Il y a tellement d'auteurs dans le cinéma mondial d'importance, essentiel. Ce que je découvrais, c'est que justement il n'y avait pas que l'esthétique de la grande forme américaine, il y en avait plein, et que le cinéma était un objet beaucoup plus complexe qu'il n'y paraissait. Ce qui m'importait, c'était la manière non seulement dont ces gens racontaient des histoires mais donnaient aussi la possibilité à travers ça à d'autres de se raconter et d'être vivants pour le reste du monde. D'être visibles. Le phénomène est sans fin, en tous cas on l'espère, et l'exploration ou le désir que ça suscite soit entretenu dans le cinéma présent comme dans la manière de retraverser ce cinéma-là. C'est le cas cette année avec la rétrospective du cinéma qui appartient véritablement au cinéma US sauf que c'est la part la moins visible et la plus minoritaire de ce cinéma sur les écrans. D'où la nécessité d'en proposer une sorte d'anthologie et de mettre en évidence un fait très contemporain : l'émergence d'une nouvelle génération de cinéastes noir US depuis une petite quinzaine d'années. Avant, il y a eu des noirs US qui ont fait des films et qui ont fait des films parfois avec beaucoup de singularité, d'affirmer aussi une identité culturelle, un désir de cinéma fort et que ça ça raconte non seulement l'Amérique, mais une autre Amérique.
Combien de films dans cette rétrospective ?
41 films. C'est à ce jour probablement le plus vaste ensemble de cinéma afro -US présenté en Europe.
Ca c'est un des éléments de cette année. Vous avez pris la direction du festival en 2010, on est en 2019, comment avez-vous vu les cinématographies des 3 Continents évoluer ?
Ce qui me frappe, c'est que, depuis presque 20 ans, on est rentrés dans une sorte de guerre globale du cinéma qui est une des conséquences d'un marché mondialisé des objets culturels. Les films, comme beaucoup d'autres choses, sont un des produits mis en avant par ce marché. Depuis pas mal d'années, la cinéphilie est devenue une sorte de phénomène également global. Les gens aujourd'hui avec qui j'échange le plus sur le cinéma ne sont pas seulement les gens qui sont à côté de moi, avec qui je discute tous les jours, mais souvent des critiques argentins, hong-kongais, japonais... On se parle quasiment toutes les semaines, de ce qu'on a vu les uns et les autres, on s'échange des films aussi, beaucoup. Le partage d'expérience s'est considérablement élargi. Les films ont toujours eux-mêmes un ancrage très local : ce qu'ils donnent nous à voir, c'est ce qu'il y a quasiment à portée de caméra, pas par paresse, mais vraiment parce que les cinéastes filment ce qui se passe autour d'eux et puis en même temps, on apprend, on a une manière de creuser le temps présent comme ça à travers ces films qui est quasiment incroyable, ce qui fait que l'échelle locale qui a longtemps prévalu dans l'histoire du cinéma, le cinéma français, le cinéma allemand, italien, espagnol, etc. ou le cinéma hong-kongais ou taïwanais ce sont des échelles quand même aujourd'hui largement remis en question par la dimension planétaire du phénomène. D'ailleurs, les films argentins sont nourris d'un imaginaire qui passe par le cinéma européen, les films hong-kongais par d'autres. Les choses se croisent comme ça et effectivement c'est ce mélange qui participe à une dynamique très forte du cinéma contemporain. Tout le monde voit des films d'ailleurs...
...quelles sont les conséquences de cette évolution sur le fonctionnement du festival?
A un instant t, je sais que quand je reçois un film du Vietnam, de Bolivie ou du Brésil, je ne suis pas le seul à l'avoir reçu. Ce film a été envoyé à un certain nombre d'autres programmateurs, il y a une petite liste de programmateurs que les producteurs ou les vendeurs cherchent à toucher de manière très privilégiée, dont les 3 Continents pour la France parce que c'est une porte importante pour ces films-là. Je vais en recevoir juste après le festival, ça ne s'arrête jamais: dès le mois de décembre avant Noël, j'aurai 7 ou 8 à visionner pour l'année prochaine, des films qui peut-être seront en première à Rotterdam ou à Berlin... Qui ont peut-être déjà été envoyés au sélectionneur de Cannes certaines fois. Dans la réalité, on voit tous à peu près les films au même moment. Ca ne veut pas dire que la programmation est identique partout, que les choix éditoriaux sont équivalents, qu'on cherche tous la même chose, loin de là, parce que d'abord on a des sensibilités différentes et puis au regard de ce dont on parlait une histoire personnelle qui fait que. Néanmoins, le numérique a bouleversé nos pratiques et nos manières de faire: avant, on allait beaucoup à la recherche de films, ce qu'on continue à faire quotidiennement, mais il y en a beaucoup qui nous arrivent comme ça sans qu'on les ait demandés. La paresse pourrait encourager à se satisfaire de ce rapport à internet aux plate-formes de visionnement et à une relation aux vendeurs internationaux, qui ont par ailleurs tendance à la fois à donner une visibilité à beaucoup plus de films qu'auparavant et en même temps un peu à uniformiser les choses. Comme sur tout marché. Ce que nous refusons de faire.
De tout ce patch-work, la place des 3C dans les festivals qui mettent en avant les cinématographies du monde entier est-ce qu'on peut dire aujourd'hui la place exacte de ce festival-là ?
La capacité du festival à grossir et à s'élargir a été une question forte, un véritable enjeu. Même si aujourd'hui les moyens dont on dispose sont toujours un peu trop limités, c'est assez contraignant parfois de continuer à faire preuve d'ambition au regard du budget ou du financement qui est le nôtre, néanmoins, je pense que la force des 3 Continents est d'avoir résisté à l'idée de grossir. Quand Berlin présente 400 films, je ne sais pas ce que Berlin me donne à voir. C'est un énorme festival, une plate-forme avec un marché essentiel aujourd'hui. Cannes présente 3 fois moins de films que Berlin. Venise s'est un petit peu élargi ces dernières années, mais dans des proportions beaucoup plus restreintes. Ce n'est pas parce qu'un festival est très volumineux que la qualité est forcément au rendez-vous. Nous, ne pas grossir, avoir une seule compétition, fait qu'on porte une attention très soutenue à un nombre limité de films contemporains. On dit : ceux-là méritent qu'on y porte attention. Je pense que c'est ce qui continue de faire sens, c'est que les choix qu'on met en avant sont des choix forts - qu'on peut les discuter bien entendu-, mais c'est ce qui nous distingue. Probablement avec aussi une caractéristique des 3 Continents : c'est qu'on a la mémoire de l'histoire de ces cinémas, une mémoire très précise, détaillée fournie par 40 ans. On est moins susceptibles d'être influençables ou de suivre les tendances du moment.
Vous parliez en introduction de votre multi-sensibilité au monde, pas seulement par le cinéma. C'est ce qu'on retrouve cette année dans la multiplication des initiatives à droite à gauche, comme à Stéréolux où il y aura une soirée avec un documentaire et un concert? Cette multi-sensibilité imprègne de plus en plus le festival ?
Je ne veux pas faire du F3C un événement réservé à "l'élite cinéphilique". Je pars toujours du principe, et je pense que c'est parce que c'est comme ça que je me suis construit dans mon rapport au cinéma, que tous les films sont pour tout le monde. Il suffit de les voir pour vérifier à quel point certains films nous parlent. J'en vois beaucoup, certains ne m'intéressent pas du tout, mais par ailleurs pour pouvoir me constituer un réseau extrêmement dense de références, qui vont de films très grand public à Jean-Luc Godard, je pense qu'il n'y a pas nécessairement d'incompatibilité entre les registres du cinéma populaire ou les formes les plus exigeantes. Il y a des films dans lesquels on rentre de manière imprévisible dans une relation très forte. Ca peut prendre la forme d'un film de Tsui Hark qui s'adresse à un très grand public ou dans le programme de cette année à ces films à la limite parfois du cinéma expérimental du cinéma noir-US des 70's du mouvement LA-rebellion qui sont pour certains pour moi des films que "Killer of sheep" de Charles Burnett est pour moi un film absolument incroyable ou "Passing Through" de Larry Clark qui seront là tous les deux pendant le festival, un film free-jazz complètement déluré et bouleversant, je pense c'est une des grandes grandes incarnations du jazz à l'écran, peut-être une des plus belles. Si je peux les voir, moi, je suis persuadé que tout le monde peut les voir. Cette idée de sortir d'un territoire balisé, des salles, des chapelles cinéphiliques il est extrêmement important de montrer qu'on peut porter ailleurs les valeurs ou les qualités de ces films en décloisonnant les relations avec les publics
Vous allez aussi explorer d'autres formes d'expression artistiques, puisqu'il y aura un concert aussi. Vous disiez tout à l'heure que le cinéma était une des formes de sensibilité au monde mais qu'il y en avait beaucoup d'autres et c'est un peu le chemin qu'est en train de prendre le festival, autour du cinéma ,autour du cinéma en n'hésitant pas à prendre des initiatives qui ne sont pas du cinéma ?
Dans la culture afro-US, on voit tout de suite l'importance de la musique. Si on dit culture afro-US, tout le monde va nous parler de soul-music, de blues, de jazz, de funk, de rap... c'est vraiment à travers toutes ces expressions majeures et la plus évidente pour tout le monde. Il y avait donc un pont très particulier et nécessaire à franchir entre cinéma et musique. Chaque programme doit trouver une forme et il y a beaucoup de musique dans les films qu'on va montrer, je ne sais pas ce qu'avec un autre cinéma ce qu'on pourrait chercher. L'idée n'est pas de mettre des films les uns à la suite des autres, c'est véritablement de travailler dans le détail pour porter ces films, ce qu'ils nous racontent, de la façon la plus pertinente et ouverte possible. Là, la musique était un point de passage quasiment impératif. On a donc proposé à Stéréolux une soirée en collaboration qui inclut un concert filmé et puis un concert live dans la foulée.
Un mot de conclusion ?
Si je devais essayer de synthétiser mon propos, c'est que je pense vraiment que le cinéma reste un objet de plaisir pour tout le monde. On voit le désir de fiction des gens à travers les plate-formes qui consomment des films parce que c'est une manière très immédiate d'y répondre. On aime qu'on nous raconte des histoires, on aime en partager avec d'autres etc. Il y a là dedans quelque chose qui relève d'un savoir irréductible et je pense que le travail d'un festival, tel que j'envisage mon rôle de programmateur - passeur de plat, c'est de lier le plaisir au savoir et inversement de dire que plus il y a de savoir plus il y a de plaisir.
Propos recueillis par #PG9
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